Un petit jeu sans conséquence

Jean Dell et Gérald Sibleyras | du 27 avril au 22 mai 2022

Une comédie d’aujourd’hui sur une trame éternelle.

Si toute vérité n´est pas bonne à dire, tout mensonge ne l´est pas non plus.
Lors d´une joyeuse partie de campagne, autour de la maison de famille qui vient d´être vendue, Bruno et Claire jouent avec les sentiments de leur entourage et découvrent que, non décidément, ‘on ne badine pas avec l´amour’…

Une pièce sur la fragilité du couple, de l’amitié et des certitudes.

DISTRIBUTION

Avec Cécile Florin
Christel Pedrinelli
Alexis Goslain
Pierre Pigeolet
et Marc Weiss

 Mise en scène : Martine Willequet
Scénographie : Noémie Vanheste
Costumes : Fabienne Miessen
Création lumières : Laurent Comiant

QUELQUES PHOTOS

© Isabelle De Beir/ Kim Leleux

POUR EN SAVOIR PLUS 

​Autour d’un buffet de pique-nique, ne tournent pas que des guêpes, des mouches et des frelons. Entre la salade de pâtes, le taboulé et les macarons, on croise aussi des buses à l’affût de leur proie, des tapirs affamés, des pigeons qui roucoulent et même des renards qui passent à l’attaque… Une vraie ménagerie dans une jungle sans pitié…

Claire et Bruno forment, depuis 12 ans, un couple établi, une institution. Au cours d’une journée entre amis dans la maison de famille, lassés d’incarner l’icône d’un couple immuable, ils vont feindre une séparation. Par provocation, sur un coup de tête… C’est un jeu, c’est drôle, mais c’est dangereux…

Une comédie désenchantée et cocasse, un rien cynique, sur l’hypocrisie et la cruauté des relations amicales, cette fable joliment écrite décline avec esprit quelques bons vieux préceptes du style : « il ne faut pas jouer avec le feu »…

Histoires à quatre mains

Jean Dell et Gérald Sibleyras se sont rencontrés à l’occasion d’une émission pilote, qui n’a jamais vu le jour mais qui leur a permis de se lier. Jean propose à Gérald de le rejoindre à France Inter. Le tandem est formé. Ils écrivent des sketches politiques et collaborent à l’émission, Curriculum vite fait. En quittant la radio, ils se tournent vers le théâtre. C’est ainsi qu’est né Le Béret de la Tortue, mis en scène par François Rollin au Splendid durant la saison 1999-2000.

​Puis, Un petit jeu sans conséquence. Comment le sujet leur est venu ? « Pendant notre aventure au Splendid, certains auraient été ravis de nous voir nous brouiller. De fil en aiguille, nous avons imaginé un couple qui fait semblant de se séparer. »

​J’en viens à la question qui me taraude : ont-ils une méthode de travail bien établie ? Si oui, laquelle ? Jean : « On se fixe rendez-vous le matin, et on travaille quatre, cinq ou six heures de suite. Sans compter les repas. » Gérald, pince-sans-rire : « Oui, Jean mange énormément. » Chez qui les séances de travail ont-elles lieu ? « Chez l’un ou l’autre, indifféremment. »
​En général, c’est Gérald qui pianote sur le clavier de l’ordinateur.

​Chacun sa spécialité : « Le point fort de Jean, c’est la construction. Moi, j’ai surtout le sens du dialogue. Mais Jean est quand même bon dialoguiste. » Jean : « Et toi bon constructeur. »
​Quels avantages tirent-ils du travail en commun ? « Chacun est le public de l’autre. Ça évite des errances, ça oblige à être le plus clair possible, à être plus exigeant dans la formulation de sa pensée. Bien sûr, il faut parfois mettre son orgueil dans sa poche, faire des concessions. Mais on gagne beaucoup en efficacité. En fait, écrire à deux n’a que des avantages. Hormis l’obligation de couper les droits d’auteur en deux… »

​Pourquoi leur association a-t-elle si bien réussi ? Ils n’ont pas beaucoup de points communs. Ils se complètent. Jean, marié, est un militant du mariage et prêche la fidélité. Gérald, plus dubitatif, a choisi l’union libre. Cette divergence de vues a certainement joué dans l’élaboration d’Un petit jeu...

​Leurs références ne sont pas non plus les mêmes. Jean vous parle volontiers de Feydeau, Guitry, Ray Cooney… Gérald évoque plutôt Nathalie Sarraute et Yasmina Reza.
​De là à conclure que leur écriture se situe entre celles de Ray Cooney et Yasmina Reza…

Extraits du texte de Jacques Nerson paru dans L’Avant-Scène, n°1119.

Martine Willequet 

Quels sont les éléments qui ont éveillé ton intérêt à la lecture de ce texte ?

Ces deux auteurs écrivent de très belles choses. Sous des airs un peu légers, c’est une pièce qui provoque une réflexion sur les comportements humains. C’est une comédie désenchantée et drôle sur l’hypocrisie et la cruauté des relations amicales, elle décline avec esprit quelques bons vieux préceptes, genre « il ne faut pas jouer avec le feu »…

A la création de la pièce, on a fait une comparaison avec Marivaux, tu trouves ça juste ?

Oui, d’une certaine manière, je peux le comprendre. Il s’agit de marivaudage, on joue avec les sentiments, on se fait passer pour quelqu’un d’autre, donc je comprends que le rapprochement puisse se faire, mais bon, sérieusement, la langue n’est pas la même. Même si c’est très bien écrit, on a ici un langage très quotidien, très contemporain.

C’est une pièce où on se fait passer pour quelqu’un d’autre, où on ment, et le fait de mentir provoque chez les autres personnages des réactions auxquelles on ne s’attendait pas. C’est ça qui est intéressant. Grâce au mensonge, les gens se dévoilent, des facettes inconnues, même de gens qu’on croyait très bien connaître, apparaissent. Des sentiments parfois violents et des ressentiments voient le jour. On peut donc faire une légère comparaison mais n’oublions pas qu’on est dans un jardin en baskets…


Est-ce que nous sommes face à une comédie ?

​Ce n’est pas écrit comme une vraie comédie, bien qu’il y ait pas mal de répliques spirituelles qui font mouche. Les personnages sont très bien dessinés, ils sont très différents tous les cinq et la rencontre de certains donnent des heurts ou des réactions inattendues mais nous sommes sur un fil. Ils sont dans la séduction tout le temps. Ce n’est pas non plus une tragédie. Les auteurs se basent sur des petites choses quotidiennes et ils creusent le sillon. Ça fait rire, sourire et ça pose question.


​C’est une belle étude de caractère ?

Tout à fait et c’est ce que j’aime bien. Les cinq personnages sont très différents et ont chacun quelque chose de touchant, même dans leurs excès éventuels ou dans leurs caractères très marqués. Il y a quelque chose de très humain chez chacun, qu’on ne décèle pas tout de suite mais qui se révèle au fur et à mesure du développement de l’action.
​La pièce se déroule tout entière le temps d’un pique-nique, dans une maison à la campagne où l’on fête l’anniversaire d’une dame que l’on ne verra jamais. Ce sont des couples d’aujourd’hui, de ceux qui se croient sans histoires et qui pourtant craignent l’usure, de ceux qui ne parviennent pas à se former, de ceux qui jouent le cynisme pour mieux cacher leur malaise.


Dans la première scène, Claire dit à son mari « J’ai dit qu’on se quittait » …

​Tout tourne autour d’un couple Claire et Bruno (Christel Pedrinelli et Alexis Goslain) marié et heureux depuis douze ans… et puis un jour, elle estime qu’ils deviennent un couple ‘plan-plan’, et ça l’agace. Elle va lancer une rumeur comme quoi ils se séparent… Cette nouvelle va dévoiler chez les gens des attitudes auxquelles ils ne s’attendaient pas du tout. Ce mensonge provoque des réactions totalement inattendues et très déplaisantes. Axelle, jouée par Cécile Florin, est extrêmement vexée et blessée d’apprendre par le cousin Patrick, looser génial et catalyseur d’emmerdes, (Pierre Pigeolet) que sa meilleure amie se sépare de son mari. Elle le prend très mal, ce qui entraine une tension entre elles et une incompréhension mais ça va aussi illustrer l’envie et la jalousie qu’Axelle cachait en elle. Serge, joué par Marc Weiss, agit comme un révélateur, c’est un personnage qui se retrouve là alors qu’il n’avait rien à y faire et il va provoquer des réactions en chaîne. Par sa séduction, il va secouer le groupe familial et amical.


Ça me fait penser à une pièce que tu avais montée aux Galeries, « Un vrai bonheur » de Didier Caron.

C’est de la même veine, ça démarre bien puis un détail fait que ça se délite et ça va vers la catastrophe. Ces auteurs sont contemporains… Leurs écritures sont comparables et en plus, ça se passait aussi à l’extérieur, sur un perron. Peut-être que le grand air incite à dire des vérités… Ces auteurs manient des dialogues très vifs et des rebondissements habiles.