Cuisine et dépendances
Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri | du 14 septembre au 09 octobre 2022
Un texte féroce, drôle, lucide et ingénieux.
DISTRIBUTION
Bénédicte Chabot,
Catherine Decrolier,
David Leclercq,
Frédéric Nyssen
et Dominique Rongvaux.
Mise en scène
Patrice Mincke
Décor et costumes
Lionel Lesire
QUELQUES PHOTOS
POUR EN SAVOIR PLUS
Jacques et Martine, couple apparemment sans histoire, accueillent de vieux amis qu’ils n’ont pas revus depuis dix ans. Ils ont organisé un dîner en l’honneur du mari de Charlotte, devenu présentateur-vedette à la télévision. Parmi les invités figurent aussi Georges, le copain hébergé et Fred, l’envahissant frère de Martine. Au cours de la soirée, la tension monte, la présence de celui qui a réussi déchaîne admiration, envie, jalousie et agressivité.
Tout cela est vu de la cuisine, où les convives viennent tour à tour se livrer, se plaindre et s’expliquer. La maîtresse de maison, entre deux plats, est dans tous ses états pendant que les personnages dévoilent, petit à petit, leurs névroses respectives…
Dans cette comédie sociale pertinente, Agnès Jaoui et Jean-Pierre Bacri partagent un même regard et une même envie de bousculer nos torpeurs, nos paresses et nos conformismes.
Patrice Mincke
Entretien avec Florian Zeller
Ce que j’aime particulièrement dans l’écriture de Jaoui/Bacri, c’est la légèreté avec laquelle ils abordent des sujets sérieux – ou bien est-ce le sérieux avec lequel ils explorent la légèreté ?
Derrière des dialogues efficaces, drôles et caustiques se révèlent des personnages consistants et complexes avec leurs névroses, leurs aspirations déçues, leurs failles et leurs espoirs souvent dérisoires. Arrivés à la quarantaine, que sont-ils devenus ?
La force de ce texte réside, entre autres, dans une trouvaille audacieuse des auteurs : les deux personnages dont on parle sans cesse, qui révèlent le pathétique de chacun des cinq amis, n’apparaissent jamais sur le plateau ! Marilyn, jeune femme pulpeuse, sexy et apparemment un brin vulgaire, et le mari de Charlotte, homme de télévision clinquant, vont déchaîner les passions.
Martine, émoustillée et servile, ne peut s’empêcher de comparer son petit mari à la brillante vedette et file enfiler sa plus belle robe comme une pathétique cendrillon ; Charlotte, habituée à abandonner son mari à sa gloire de pacotille et à sa séduction facile, tente d’entretenir l’illusion de l’amour avec son amant. Georges, désœuvré et fauché, squatte un canapé et s’est épris de haine et de mépris pour le monde entier. Jacques se réfugie dans le conformisme et l’admiration béate de l’éloquence de son invité vedette et de la plantureuse poitrine de la copine de son beau-frère. Et Fred passe d’une conquête futile à l’autre et d’une arnaque à la suivante. Un bilan amer de ce que la vie fait de nous…
Les seuls qui forcent l’admiration sont ceux dont les réussites sont ostentatoires et superficielles : avoir de beaux seins ou passer à la télé. Il est à noter qu’il n’est jamais fait mention du nom ni de l’emploi précis de la star du petit écran. Présente-t-il la météo ou une émission culturelle ? On s’en fiche, ce qui compte c’est qu’il soit célèbre. Signe des temps remarquablement saisi par Jaoui/Bacri, d’une époque où « célèbre » est devenu une profession.
Cuisine et Dépendances est un texte qui allie magnifiquement humour et profondeur, rire et cynisme. Un cocktail qui m’a toujours plu.
Il s’agira donc dans mon travail de révéler le pathétique de chaque situation tout en travaillant avec les comédiens sur la sincérité et la subtilité. Et, ainsi, d’amener les spectateurs à rire tout en s’identifiant à chacun des personnages.
Patrice Mincke